Bâtir à une autre échelle !

Projet - Le Drummond à Montréal

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Les tours poussent drues au centre-ville de Montréal. Comme quoi la ville doit rattraper Toronto, Vancouver et New York en ce sens, chaque tour ajoutant au luxe de la suivante. Cependant, une tour se démarque du lot et s’inscrit dans le parcours parfait d’un constructeur qui a fait ses classes à Montréal : Le Drummond.

«Le Drummond représente pour Samcon une étape historique, commence le président Sam Scalia. Notre premier projet était un immeuble de huit logements sur trois étages à structure de bois rue Saint-Christophe, dans le CentreSud. Nous avons graduellement augmenté notre production pour réaliser de 15 à 20 projets de ce type en même temps. Notre première structure en béton était le projet André-Grasset, comportant huit étages. Puis ce fut le Métropol avec ses 15 étages. Nous pouvons maintenant nous appuyer sur une expérience de construction en béton de 15 ans pour lancer Le Drummond.» Sam Scalia raconte comment s’est élaboré ce projet en 2010-2011. «Nous envisagions l’achat de ce terrain, un emplacement de choix, un peu en retrait de la circulation tout en étant à proximité de la rue Sainte-Catherine, des restos, des salles de spectacle, des boutiques et de tout ce qu’a à offrir la vie urbaine. La restriction de hauteur sur le lot était cependant problématique.Nous avons été chanceux, dit-il, car c’est l’arrondissement qui a changé la hauteur maximale à 80 pieds pour le secteur, reconnaissant qu’à l’instar de Toronto et Vancouver, Montréal se devait de construire en hauteur si elle voulait donner un nouvel élan au cœur de la ville et y attirer des résidents. Demander nous-mêmes un changement de hauteur aurait été beaucoup plus difficile.»

Le concept du Drummond est fort simple : la tour de 25 étages est assise sur un basilaire de trois étages en brique de couleur anthracite. L’élévation correspond à celle de l’ancienne patinoire Victoria (maintenant un garage inté- rieur), un bâtiment historique où s’est disputé le premier match pour la coupe Stanley (la rue du même nom n’est pas très loin d’ailleurs). La tour étant légèrement en recul, cela permet l’aménagement de terrasses sur le basilaire. La brique et le verre prennent le relai jusqu’au 13e étage et la tour se termine en verre jusqu’au 25e . «La tour fait le pont entre les immeubles en brique de la rue Sainte-Catherine et les tours vitrées du boulevard René-Lévesque. La deuxième phase au nord de l’îlot sera un peu moins élevée, encore une fois par souci d’intégration aux édifices de plus faible hauteur de la rue Sainte-Catherine», explique l’architecte Marco Manini. Le Drummond comporte des espaces commerciaux sur la rue Drummond. Sur la ruelle, on a préféré implanter des maisons de ville sur deux étages qui donnent sur une cour privée. Jusqu’au 20e étage, la typologie se répète avec des unités de 4 ½ pièces aux quatre coins de la tour et des unités de 3 ½ à l’intérieur. «À partir du 20e , étant donné les vues dégagées, on retrouve des unités plus spacieuses, reprend Sam Scalia. Nous pouvons même offrir une unité de 5 000 pi ca qui irait chercher 4,6 millions $ !»

Cela dit, la plupart des unités comportent une ou deux chambres à coucher et leur prix se situe entre 300 000 $ et 500 000 $.

Un constructeur prudent

Pour réaliser ses projets, Sam Scalia s’en tient à la méthode traditionnelle : pas de fast-track, ni de design-build ou de Building information modeling (BIM). Il a pour son dire que les méthodes les plus simples sont encore les meilleures. Par contre, l’entreprise utilise le système Revit, un logiciel 3D d’Autodesk pour les dessins de mécanique et de structure.

Prudent, Sam Scalia a préféré confier le chantier du Drummond à Magil qui compte plusieurs années d’expérience dans la construction en hauteur. «Peut-être ferons-nous le travail nous-mêmes éventuellement, mais pas tout de suite », confesse le président.

Selon l’ingénieure Valérie Chartrand, de NCK inc., la charpente de béton du Drummond est on ne peut plus classique. Elle a cependant demandé quelques soins au niveau des fondations, étant donné l’exigüité des lieux et l’excavation de trois étages dans le roc. «Il a fallu blinder la paroi d’excavation sur les quatre faces et installer un tirant sur un côté », explique-t-elle. Il ne fallait pas oublier non plus de changer d’angle lors de l’excavation afin de ne pas entrer dans le sous-sol du voisin!

Si les étages se ressemblent, mis à part le rezde-chaussée et la mezzanine, le retrait au 3e étage a obligé d’adapter une colonne de coin au sudouest dont l’alignement change légèrement et dont la charge a été transférée sur un abaque. Les ingénieurs ont aussi tenu compte de la présence d’une piscine en béton sur le toit qui repose sur la dalle de toit et comporte une plage en béton tout autour. Les murs de cisaillement sont aussi en béton.

«La construction inversée (top-down) n’aurait pas été appropriée dans ce cas, car nous n’étions pas coincés par l’échéancier. Cette méthode s’avère plus dispendieuse, ce qui ne convient pas lorsque l’on parle de copropriétés abordables», termine l’ingénieure.

La construction de la première tour est facilitée par l’utilisation de la partie nord du lot pour l’organisation; ce sera une tout autre chose quand Samcon procèdera à la construction de la seconde tour. «Nous avons un terrain sur Stanley, mais sans doute faudra-t-il louer la rue, ce qui est très dispendieux», admet le promoteur.

Le chargé de projet James Gabriel, de la firme Dupras Ledoux, considère que la simplicité du Drummond est un facteur de succès économique. L’entreprise œuvre aussi sur les chantiers voisins de l’Avenue et de l’Icône, des projets de gamme plus élevée. L’ingénieur souligne qu’il est plus difficile de faire beaucoup avec peu d’argent qu’en ayant un budget pratiquement illimité.

Cela dit, Le Drummond représente toute une évolution pour Samcon. «Nous avons travaillé sur le dernier projet en hauteur de Samcon, Le Métropol. Passer à 25 étages, c’est toute une étape, s’exclame l’ingénieur! C’est un produit inhabituel pour Samcon, mais qui répond bien à sa clientèle ».

« Le fait de construire en hauteur présente des défis particuliers au plan mécanique, étant donné la circulation verticale de l’eau et de l’électricité qui peut occasionner des chutes de pression et de tension importantes. Des exigences plus grandes sont aussi imposées au niveau de la protection incendie. »

La vie urbaine

Le designer Olivier Bouyssou d’Optima Design apprécie le type de collaboration qu’il entretient avec l’équipe de Samcon. «Ils sont très ouverts à de nouvelles idées. C’est un travail collaboratif très agréable », assure-t-il. La firme Optima s’est chargée de la conception du lobby, qui rappelle les hôtels boutiques, avec sa palette plus foncée de noir et de gris anthracite. « Nous visons une clientèle de millénaires, très urbains. Nous cherchons à créer un peu de magie, de glamour», précise-t-il. L’élément phare du projet sera le Cube, un espace de trois étages tout vitré au-dessus de l’entrée principale qui abritera un « lounge », un gym et un studio de yoga et de Pilates. « Le Cube se situe entre les deux tours, en retrait du basilaire, ce qui dégage un espace extérieur intéressant pour les copropriétaires. Cette placette en fait un point focal», note le designer, avec trois programmations distinctes, mais reliées par des bandes de porcelaine qui courent à la verticale sur les trois étages. Aux espaces communs s’ajoutent la piscine sur le toit, traitée au sel, et un coin-repas avec BBQ qui permettront aux résidents de se prévaloir des vues sur le Mont-Royal et la ville.

Optima avait proposé pour les corridors de reproduire sur les murs une forêt en hiver pixélisée, mais il a fallu se rendre à l’évidence qu’un tel revê- tement ne serait pas durable avec les va-et-vient et les déménagements. «Nous travaillons plutôt dans le secteur commercial où nous sommes habitués à un « look » plus théâtral. Cela dit, les gens ne font que passer dans un commerce : ici, il s’agit d’un milieu de vie qui doit apporter un sentiment de bien-être et rassurer en quelque sorte l’acheteur qu’il a fait un bon choix.»

Quoique la superficie de paysagement soit restreinte, ce n’est pas une excuse pour s’en tenir au strict minimum. Éric Fleury, de Hodgins et associés, s’est particulièrement attardé aux unités du rez-de-chaussée qui seront pourvues d’une cour arrière. Situé sur la dalle de garage, ce milieu ombragé et venteux ne se prête pas beaucoup à la végétation.

«Nous aurions pu nous en tenir au béton et à quelques bacs, mais nous avons plutôt proposé une solution hybride, qui ajoutait à la vue des étages supérieurs», explique-t-il. Chaque cour arrière présentera un damier aléatoire de béton et une surface en gazon synthétique. Les bacs de plantation seront en acier galvanisé et prendront avec le temps une patine d’aspect minéral. L’architecte a retenu les végétaux pour leur résistance aux conditions particulières de l’endroit.

«Nous sommes souvent appelés à refaire des toits-terrasses. Nous avons opté ici pour la durabilité et n’avons pas succombé aux tendances qui datent parfois trop et qui obligent une mise à jour cinq ou dix ans plus tard », souligne l’architecte-paysagiste. Les conseillers ont aussi fait ajouter des sorties d’eau qui permettront aux copropriétaires de nettoyer les surfaces qui deviendront très poussiéreuses étant donné l’endroit.

Construire en partenariat

Depuis les débuts de Samcon, Sam Scalia se fait fort de bâtir des partenariats durables avec ses principaux sous-traitants et fournisseurs ainsi qu’avec ses partenaires financiers. Cette attitude vaut aussi pour la conception qui se fait en étroite collaboration avec les divers arrondissements.

« Les arrondissements veulent la mise en valeur, ils accueillent chaudement ces nouvelles sources de revenus. Quand on travaille avec eux et que l’on écoute ce qu’ils ont à dire, ils vous appuient sur toute la ligne. Il est inutile de rester sur ses positions : cela ne fait que créer des délais supplémentaires. L’exercice de consultation auprès de la population est aussi beaucoup plus aisé lorsque vous avez l’appui de l’arrondissement.»

Vive concurrence

Si Samcon était seul sur son île au début du projet Le Drummond, la concurrence s’est installée depuis lors et d’autres tours poussent à proximité, dont le Roccabella, l’Icône, L’Avenue, le Yul pour ne nommer que celles-là. «Notre tour n’est pas aussi élevée, ce qui signifie que la construction est moins dispendieuse en partant. Cela nous a aussi permis d’installer une piscine sur le toit, ce qui donne à notre projet des airs de villégiature», ajoute Sam Scalia.

Samcon a su tirer son épingle du jeu en s’appuyant sur l’image de marque et le renom que l’entreprise a bâti depuis de nombreuses années. «Nous avons construit jusqu’à 500-600 unités certaines années. Nous offrons un produit de qualité, à prix abordable et nous rejoignons plusieurs types d’acheteurs: les jeunes professionnels qui travaillent au centre-ville et cherchent un style de vie franchement urbain, les étudiants dont les parents investissent dans une unité le temps des études ainsi que les étudiants étrangers, mais aussi les professionnels plus âgés qui vendent leur maison de banlieue et ne cherchent pas un luxe inouï.»

Puisque le projet est au centre de la ville, Samcon s’est tout de même permis quelques notes distinctives. C’est ainsi que les armoires de cuisine et les vanités sont signées Scavolini, un fabricant italien dont les produits sont de qualité supérieure à un prix compétitif. Les portes intérieures des unités, de marque Braga, proviennent aussi d’Italie. Les planchers sont de bois franc et les électroménagers de plus haut de gamme sont inclus.

«Nous assistons à une reprise de l’activité dans le secteur immobilier. Les ventes vont très bien», se réjouit Sam Scalia. À un point tel que l’on envisage de commencer les ventes de la deuxième phase à l’automne et la construction au printemps 2017.

Un effort de redéveloppement

Samcon fait plus que de simplement réaliser des projets. L’entreprise se spécialise dans le «redé- veloppement urbain» et offre une réponse à la pénurie de logements abordables et de qualité. «Dans le Centre-Sud, j’ai écumé les rues de bas en haut à la recherche de terrains pour des projets d’insertion, relate le promoteur. La drogue, la prostitution y régnaient; les bâtiments étaient en mauvais état et les propriétaires ne voulaient plus investir dans leur propriété. On ne croyait pas au succès de ces projets et nous avons même dû convaincre les acheteurs. Quand j’y pense, il a fallu du courage… et aussi plusieurs mauvaises nuits! Mais après plusieurs appels à la police, les rues ont été nettoyées et le secteur a pris du mieux. HochelagaMaisonneuve, Ahuntsic, Villeray : tous les secteurs où nous avons construit ont changé.»

Projet: Le Drummond à Montréal
Projet: Le Drummond à Montréal

Il en va de même pour Le Drummond, qui s’inscrit dans la revitalisation de la rue SainteCatherine. « Le cœur de Montréal était troué de stationnements à une époque, laissé à l’abandon», remarque-t-il.

Que réserve Samcon après Le Drummond? Deux nouveaux projets seront lancés, soit Uni-T 3 dans Mercier-Hochelaga-Maisonneuve et LDV 5 dans Villeray-Saint-Michel-Parc Extension. L’entreprise détient aussi trois autres terrains à mettre en valeur à Montréal. Elle commence à s’intéresser aussi à d’autres marchés, notamment à Ottawa et à Québec. Compte tenu de son parcours, on peut assurément affirmer dans son cas que petit train va loin…

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qui-fait-quoi

Feuille de route du promoteur Samcon

Fils de constructeur, Sam Scalia a créé Samcon en 1991 avec un premier projet, Le Saint-Christophe (huit unités). Dès lors, l’entreprise s’est donné comme mission de redévelopper des secteurs moins prisés de Montréal en offrant un produit de qualité et abordable. C’est ainsi que Samcon a rendu des secteurs montréalais comme le Centre-Sud, le Plateau, le Sud-Ouest et Mercier/Hochelaga/Maisonneuve plus intéressants et a contribué à leur revitalisation.

Samcon construit maintenant dans plus d’une dizaine de quartiers montréalais ainsi qu’à Laval. Depuis 1991, l’entreprise a réalisé plusieurs projets d’envergure, dont Les Jardins du Parc Jarry dans le secteur Villeray, Le Domaine André-Grasset à Ahuntsic, Le Laurier du Plateau, la première construction à structure de béton de l’entreprise, ainsi que Le 825 René-Lévesque Est, qui abrite le Centre de design Samcon où les clients viennent faire leur choix de couleurs et de finis. En tout, Samcon a réalisé près de 4 000 copropriétés réparties dans près d’une centaine de projets. Dans ses visées d’affaires, Sam Scalia dit se soucier au premier chef des individus qui habitent ses projets. « Chacune de nos constructions favorise le trafic piétonnier et bénéficie d’un design et d’une configuration visant non seulement à encourager les individus à délaisser leur voiture, à utiliser davantage les trottoirs de leur communauté et à prendre le transport en commun, mais aussi à atteindre les objectifs de qualité de l’air, d’énergie verte et de connectivité visés par l’administration de la ville qu’ils habitent. En prenant des décisions responsables quant à l’utilisation des terrains, nous améliorons la qualité de vie de nos résidents, tout en préservant l’environnement pour leurs familles futures. »

Mentionnons par ailleurs que l’entreprise s’est vu décerner une trentaine de prix depuis 1999, dont dix prix Domus et celui de Constructeur de l’année à quatre reprises de l’Association des professionnels de la construction et de l’habitation du Québec – région Montréal métropolitain. Elle s’est également distinguée en 2009 en obtenant le Grand Prix de l’entrepreneur d’Ernst & Young au Québec. Samcon s’implique aussi dans sa communauté par le biais de sa fondation, qui a remis de généreux dons aux établissements de santé et d’enseignement de Montréal.

Quelques projets réalisés par le promoteur Samcon

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